Dans l’État nazi, Reinhard Heydrich est considéré comme le SS idéal : grand, blond, prêt à tout. Le père de famille attentionné est l’exécuteur du fanatisme racial d’Hitler – la “bête blonde” que certains l’appellent. Qui est l’humain derrière le mythe noir ?
Reinhard Heydrich: Le carriériste
Berlin 9 juin 1942, funérailles nationales du chef SS et général de police Reinhard Heydrich, assassiné. Hitler lui-même prononce un éloge funèbre. “Il était l’un des meilleurs nationaux-socialistes, l’un des plus ardents défenseurs de l’idée du Reich allemand.” Ironie du destin : L’homme honoré est devenu nazi assez tard et par accident.
En janvier 1931, un jeune officier doit répondre devant une cour d’honneur de la Reichsmarine. Il s’appelle Reinhard Heydrich. Le lieutenant de 26 ans est accusé d’avoir promis le mariage à une jeune femme, puis s’est fiancé à une autre. La marine le congédie de manière déshonorante. Le choc de sa vie est devenu le principal moteur de Reinhard Heydrich.
Il y a cet événement clé de sa libération de la Marine, donc il y a beaucoup à compenser ici, et il le fait en voulant être le meilleur en tout. Sa fiancée Lina von Osten l’épouse malgré son licenciement. L’ardente nazie exhorte son mari au chômage à postuler à la SS, une branche paramilitaire du parti d’Hitler. Leur chef est Heinrich Himmler, 30 ans. Ses hommes servent de gardes du corps personnels pour Hitler et d’autres orateurs éminents du parti. Himmler veut transformer les SS en troupes d’élite du parti.
“Je te jure, Adolf Hitler, obéissance jusqu’à la mort.”
En juin 1931, Reinhard Heydrich se présente à Himmler et est accepté. En fait, Himmler cherchait un officier de communication qui pourrait mettre en place un service secret dans les SS – mais Reinhard Heydrichn’avait qu’une formation d’opérateur radio. Mais son comportement et son apparence ont immédiatement convaincu Himmler.
Reinhard Heydrich correspondait au cliché nazi : grand, blond, yeux bleus, l’incarnation de la figure d’un maître. Dans l’ombre d’Himmler, Reinhard Heydrich a eu une carrière rapide. Après l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933, Himmler est devenu chef de la police politique bavaroise. Il a fait de Heydrich, 29 ans, son adjoint et véritable chef de l’autorité.
Heydrich transforme la police d’État en instrument de terreur contre les opposants politiques. Un camp de concentration est installé dans la ville voisine de Dachau, et les SS deviennent des auxiliaires de police. Les critiques du nouveau régime sont arbitrairement enfermés ici. Heydrich ne s’arrête pas non plus aux grands noms. Il confisque les biens du prix Nobel Thomas Mann et veut l’arrêter parce qu’il est un opposant aux nationaux-socialistes. Mais l’écrivain est déjà à l’étranger. Heydrich veut-il faire ses preuves ?
Reinhard Heydrich est motivé. Il n’était certainement pas l’un des premiers combattants ou partisans d’Adolf Hitler et à cet égard, il y a quelque chose de compensatoire à ce sujet, c’est-à-dire le radicalisme du défunt converti.
Peu à peu, les SS prennent le commandement de la police dans tout le Reich. Il devient l’appareil de sécurité de la nouvelle dictature, un État dans l’État. Dans ce SS Reich, Reinhard Heydrich est le numéro 2 incontesté, l’homme le plus important de Himmler. Sa carrière dans la SS l’a également changé en interne. Il fait sien leurs idéaux. Ses croyances changent, mais une chose reste la même : il veut être le meilleur.
Reinhard Heydrich: Le perfectionniste
En 1935, Reinhard Heydrich écrivait dans un journal SS : « Afin de prouver la justesse de nos principes, nous devons devenir les meilleurs dans tous les domaines. » Une devise qu’il défend, par exemple dans le sport. Reinhard Heydrich est un escrimeur enthousiaste, mais aussi un marin, un cavalier et un pentathlète moderne. Une ambition avec un revers. Lorsque les adversaires Reinhard Heydrich est craint comme un mauvais perdant. L’athlète phare de la SS est plus admiré qu’aimé.
Heydrich ne semble pas avoir été une personne détendue. Il ne racontait pas de blagues, était distant, certains le prenaient pour un technocrate du pouvoir. Mais son idéologie, ce qu’il a écrit, était très, très extrême et très dogmatique. Il est également considéré comme un modèle dans sa vie privée. En 1933, Lina lui a donné un fils. Trois autres enfants suivent. Il se révèle être un père attentionné dans l’esprit des SS.
La nouvelle famille ne manque de rien. En 1937, Heydrich achète une villa avec vue sur le lac non loin du Schlachtensee de Berlin. C’est payant de faire partie de l’élite d’Hitler. Même en temps de guerre, il veut être un modèle, ne pas être considéré comme un employé de bureau pendant que d’autres risquent leur vie. Il est formé en privé comme pilote de chasse et effectue des missions sur le front de l’Est. En juillet 1941, il subit le feu anti-aérien soviétique. La machine est touchée. Reinhard Heydrich doit effectuer un atterrissage d’urgence entre les fronts.
Une patrouille allemande le trouve. Pour son atterrissage forcé, il a reçu la Iron Cross First Class, qu’il porte désormais fièrement sur son uniforme. Encore et encore, il met sa vie en danger pour impressionner les autres, conduit dans une voiture ouverte sans cohorte de sécurité. Ce sera plus tard sa perte.
L’exécuteur testamentaire
Heydrich et Himmler à la résidence d’Hitler sur l’Obersalzberg. Une visite rare. Bien que Heydrich soit un homme puissant, seul son supérieur Heinrich Himmler a un accès direct à Hitler. À une exception près. Il s’agit du pire chapitre de l’histoire allemande.
Reinhard Heydrich et Hitler se sont rencontrés peut-être dix fois personnellement, donc je ne décrirais pas la relation comme personnellement proche. Cependant, Hitler est bien sûr très conscient de Reinhard Heydrich en tant que personne, et Heydrich est toujours impliqué dans les réunions centrales lorsque la question juive est en jeu. La folie de la conspiration mondiale juive est au centre de la pensée d’Hitler et d’Himmler.
Reinhard Heydrich adopte leur image d’ennemi et passe à l’action. Pendant la guerre, il étend le réseau de la police SS à travers l’Europe occupée par l’Allemagne. Personne ne doit échapper à l’accès des SS. Heydrich veut s’assurer que toute l’Europe est libre de Juifs. En janvier 1942, Heydrich convoqua les hauts représentants du Reich à une réunion au Wannsee de Berlin. La tristement célèbre «Conférence de Wannsee».
Il veut clarifier les prochaines étapes vers la «solution finale de la question juive» dans une atmosphère détendue. Reinhard Heydrich est clairement celui qui tire les ficelles ici. Bien sûr, il est indissociable d’Hitler et Himmler comme inspirateurs et partisans de cette politique, mais c’est lui qui franchit les étapes décisives de la radicalisation. Lors de la conférence, Heydrich annonce ce que toutes les personnes présentes savent depuis longtemps. C’est un déjeuner de travail, vous déjeunez ensemble et vous vous entendez essentiellement sur des choses qui vont de soi.
Le procès-verbal montre également que, personne n’a d’objections fondamentales, ils sont informés. Ce sont les Juifs, ceux-ci et des millions dans les différents pays et nous allons tous les déporter et vous le savez maintenant. Et puis ils s’assoient tous là et : Oui, oui, ils ne sont pas surpris non plus.
Les Juifs ne sont pas seulement déportés. Deux mois après la conférence, les SS de Heydrich ouvrent un nouveau type de camp à Belzec près de Lublin : un camp d’extermination. Aujourd’hui, le lieu est un mémorial. Belzec a six hectares, donc trois ou quatre terrains de football. Ce n’est en fait rien. Et en fait, la seule chose sur ce site qui soit un bâtiment en briques est la chambre à gaz.
Les Juifs sans méfiance y sont parqués après leur arrivée. Il est marqué d’une étoile de David et de l’inscription «Stiftung Hackenholt». Une blague macabre. Hackenholt est le nom du SS qui fait fonctionner le moteur de l’installation d’extermination. Il pompe du monoxyde de carbone dans la chambre à gaz. Jusqu’à 1500 personnes par équipe sont assassinées de cette manière.
Pour Reinhard Heydrich , les assassinés sont des ennemis du Reich qu’il faut combattre sans merci. Le meurtre de millions de Juifs a ensuite été nommé «Opération Reinhard» en son honneur.
Le bourreau de Prague
En septembre 1941, Heydrich est envoyé à Prague par Hitler. En plus de ses autres fonctions, il est chargé de réprimer la résistance naissante en République tchèque occupée. À son arrivée, Heydrich a prononcé 400 condamnations à mort et déclaré l›état d›urgence.
Heydrich a introduit le travail forcé dans l›industrie de l›armement pour en tirer le meilleur parti. L›usine Skoda de Pilsen a produit des armes importantes qui ont été fournies à la Wehrmacht jusqu›en avril 1945. Il a également introduit une grande partie de la politique anti-juive et Terezin a été établi sous sa supervision.
Heydrich veut germaniser ou expulser les Tchèques, les priver de leur identité nationale. Pour démontrer son pouvoir, il demande les clés du trésor de la couronne. La couronne médiévale de Wenceslas lui appartient. Une vieille légende dit qu›une malédiction pèse sur elle : celui qui la porte illégalement mourra dans l›année. On se demande si Heydrich s›est vraiment couronné.
Eduard Benes, président du gouvernement tchèque en exil à Londres, veut envoyer un signal au monde. Son peuple continue de se battre. Dans les Highlands écossais, des soldats tchèques et slovaques en exil s›entraînent pour une opération spéciale chez eux. Ils doivent être largués en parachute et mettre fin au règne de Reinhard Heydrich .
En décembre 41, un Halifax britannique amène deux agents en République tchèque. Jan Kubis et Jozef Gabcik. Ils sont censés tuer Heydrich. Opération Anthropoïde. Anthropoïde signifie «semblable à l›homme» ou «semblable à l›homme». Pendant 5 mois après leur arrivée à Prague, les agents guettent une opportunité d›assassinat. En mai 1942, le moment était venu. Les Prague Music Weeks ont lieu au Palais Waldstein. Le couple Heydrich y est représenté le soir du 26 mai 1942. La dernière photo sur laquelle on peut voir Heydrich vivant.
Le lendemain, à 10 heures, Heydrich s›est rendu à l›aéroport dans une voiture découverte sans escorte. Heydrich était persuadé que personne n›oserait l›attaquer, simplement parce que les chefs de la résistance nationale savaient pertinemment qu›il en résulterait une immense expédition punitive. En fait, la résistance dans le pays est contre l›assassinat. Mais le gouvernement en exil à Londres l’ignore.
Il y a eu un virage serré, sa Mercedes a dû ralentir pour pouvoir lui tirer dessus avec une mitraillette. Les assaillants arrêtent la voiture et veulent tirer, mais leur arme s’enraye. À première vue, il semble que la tentative d’assassinat ait mal tourné. Au lieu de fuir, Reinhard Heydrich veut affronter les assassins. Le deuxième homme lance une grenade à main. Les agresseurs prennent la fuite, Heydrich reste sur les lieux du crime, grièvement blessé. Une semaine plus tard, il meurt à l’hôpital.
Il n’est pas mort de la blessure, il est mort d’un empoisonnement du sang. Ils n’avaient pas d’antibiotiques, ils avaient juste des sulfamides et ils n’étaient tout simplement pas assez puissants pour son infection. Il est mort d’une mort douloureuse. Les occupants se vengent de l’attaque : ils rasent le village de Lidice, non loin de Prague. Non seulement les maisons sont détruites. Lidice est un traumatisme tchèque. 173 hommes sont abattus sur place, 80 autres femmes et hommes assassinés par la suite. Quelques-uns des enfants locaux sont germanisés, comme le dit le dicton. Les autres meurent dans des chambres à gaz.
La veuve de Reinhard Heydrich reçoit la pension de veuve d’un général mort au combat, même après la guerre en République fédérale. Elle ne dit jamais un mot de regret sur les actions de son mari. C’était un homme d’honneur.
